Le Nouveau Testament, contrairement à ce que croit
lâEcclesiaste contemporain â câest a dire Tout le monde â nâest
pas un recueil de reportages ou lâaboutissement, meme approximatif,
dâun travail dâhistoriens ; il nâa pas ete conçu ni redige en
grec, mais en hebreu. En fait, la fabrication de ces textes sâest operee
dans les cadres uniques, singuliers, de la pensée traditionnelle
juive-hebraïque, selon des méthodes propres aux juifs hébreux
de lâAntiquite ; autrement dit, le corpus neotestamentaire compte
parmi les monuments eriges par le génie du judaïsme : il est le
grand oeuvre de son alchimie du verbe (sous le verbe, il faut donc
entendre, non pas le logos hellénique, mais dâabord le davar
hebraique; quant au mot « alchimie », si chacun sait quâil provient
de lâarabe al kimiya, on ignore trop souvent que celui-ci est un
synonyme dâal iksir, dont dérive le français « elixir », conçu, dans le
corpus alchimique de Jabir ibn Hayyan, comme une emanation de
lâesprit divin ; que les Mafatih al Ulum ont rapproche kimiya de
kama, « tenir secret »; et quâenfin, selon al Safadi, kimiya est dâorigine
hébraique et signifie que cette science vient du dieu vivant).
Dans le présent essai, nous réexaminons, a partir du sod (secret) de la
langue sainte, la genese des notions les plus parlantes et significatives
des textes anciens les plus essentiels des sages hebreux.
Les trois études de ce premier volume initient le lecteur à la
science des écritures juives et le préparent a entrer dans leur jardin.
Ainsi la première etude restitue-t-elle toute la saveur de la pensée
du Neant, de lâInfini et des sephiroth. La deuxième se
concentre, a travers une lecture serrée de la Lettre dâAristee, sur
lâexpression du don de la Thora en langues comme base du « proselytisme
midrashique » et de lâouverture aux nations renouvelée
par la geste des Septante. La troisième, enfin, expose ce que le
genie du judaïsme a de plus intérieur, lâinfinite meme de lâesprit
saint, câest a dire le Livre vivant, introduisant au passage toute la
radicalite, dans lâhebreu ancien, de la notion de mesure (de la cité
sainte, des livres, etc.) selon le roseau dâor du dieu.